mardi 4 novembre 2014

Episode 5


Un craquement se fit entendre et Keyne ouvrit les yeux. Allongé dos contre le mur, ses armes à portée de mains, il ne bougea pas, attendant que le bruit se réitère, mais rien ne vint. C’était seulement les poutres de la maison qui avaient dû craquer.

Keyne se releva et s’étira. La lumière filtrait à travers les interstices des fenêtres condamnées, mais également des divers trous présents dans la toiture. Keyne n’y avait pas fait attention la nuit dernière, mais au final ça ne changeait pas grand-chose, le bâtiment était sûr et c’était tout ce qui comptait.

Faisant un tour rapide des lieux à la lumière du jour, le nomade revint finalement dans la pièce principale les bras chargés de petits bois et ralluma un feu. Il vint ensuite auprès du garçon et l’ausculta. Sa respiration était calme et régulière, les traits détendus, il était clair qu’à présent son inconscience était due au sommeil. Sortant de son sac sa besace médicale, Keyne se mit à préparer le traitement nécessaire à son rétablissement complet. Mettant dans un bol quelques feuilles de chaque plantes dont il avait besoin, il s’occupa ensuite de faire chauffer de l’eau au-dessus du feu. Ce n’est qu’une fois la tisane prête qu’il se rendit compte que de l’autre côté du feu le garçon avait ouvert les yeux et l’observait.

— Tu es réveillé, tant mieux. Tu vas pouvoir boire seul ce que je t’ai préparé.

Keyne se leva et vint aux côtés du garçon. Avec des gestes sûrs il l’aida à s’asseoir et porta le bol à ses lèvres, l’aidant à boire. Une fois la tisane entièrement absorbée, il reprit le bol des mains du garçon, et retourna près de ses affaires. Là, il plongea sa main dans l’un des sacs qu’il avait posé près du feu, en ressortit une poignée de graines qu’il versa dans le bol, y ajouta une pincée d’un autre sac et recouvrit le tout d’eau bouillante. Il réitéra l’opération dans un autre bol, y plongea dans chacun une cuillère, ajouta quelques tranches de viande séchée et porta ensuite l’un des bols au garçon, avant de revenir s’asseoir près du sien et de manger son gruau tout en observant son vis-à-vis.

Le garçon ne devait pas avoir plus de 20 ans. Sans être frêle, il était toutefois mince et manquait clairement d’exercice. Ses cheveux bruns étaient coupés courts et les lunettes qu’il portait, même cassées ne dissimulaient pas des yeux marrons légèrement bridés marquant ainsi un métissage asiatique évident. Le gamin avait l’air complètement paumé de quelqu’un qui se demande ce qu’il faisait là, encore en vie. À vrai dire, Keyne se posait exactement la même question. Avec son air d’intellos et ses vêtements déchirés, il se demandait comment le garçon avait pu vivre aussi longtemps. Mais mieux valait faire les choses dans l’ordre. Avalant la bouchée qu’il venait de prendre, Keyne reposa sa cuillère dans le bol et s’adressa au garçon.

— Je m’appelle Keyne.

Sa voix avait le timbre éraillé des personnes qui parlent peu. Il ajouta :

— Et toi ?

Le garçon se dépêcha de mastiquer et d’avaler ce qu’il avait dans la bouche.

— Elis.

Il toussa sous la précipitation et se reprit, visiblement gêné.

— Merci.

Keyne haussa les épaules.

— Ce n’est rien qu’un peu de nourriture.

Et il le pensait. Comparé au sérum, ce n’était en effet rien d’important. Elis secoua la tête.

— Non…enfin si, merci pour la nourriture, mais merci…de m’avoir soigné alors que je suis…contaminé.

Son regard était baissé sur le bandage qui recouvrait la morsure de lapin. Keyne le regarda un instant avant de lâcher un petit rire.

— T’es pas contaminé.

Le visage d’Elis se décomposa.

— Pas contaminé ? Mais le lapin qui m’a mordu….

Keyne retrouva son sérieux et lui rendit un regard calme en comparaison de celui du garçon qui reflétait l’incompréhension. Il semblait avoir réellement eu conscience de son état, mais doutait sous le regard assuré de Keyne. Ce dernier hésita à lui répondre.
 
 
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